L’obésité peut cacher une sarcopénie
L’obésité, que l’on définit habituellement par une augmentation de la masse grasse par rapport à la masse non grasse, masque en réalité une grande diversité de composition corporelle. A masse grasse identique, des sujets peuvent présenter une masse musculaire extrêmement variable avec des conséquences différentes sur leur santé. Pour mieux apprécier le degré de sévérité de l’obésité, une nouvelle entité clinique a été définie : l’obésité sarcopénique. Elle est caractérisée par un excès de masse grasse associé à une réduction de la masse maigre musculaire. Observée au départ chez des sujets âgés obèses, elle a également été identifiée chez des sujets obèses plus jeunes.
Comment diagnostiquer la sarcopénie chez un obèse ?
Cette situation clinique est rencontrée chez les patients qui présentent un tour de taille important, signant la présence d’une obésité de type androïde associée à une faible musculature des membres inférieurs, mais aussi dans les obésités associées aux maladies neuromusculaires ou après agression. Pour les auteurs de la revue, il faut appliquer le diagnostic de la sarcopénie (chez le sujet âgé) à la population obèse dans sa globalité. Celui-ci repose sur l’évaluation de la masse musculaire (indice de masse musculaire ou masse musculaire appendiculaire rapportée au poids ou à la taille) additionnée de l’un des deux critères : réduction de la force musculaire et/ou de la performance physique.
Quel impact fonctionnel et clinique ?
Des études longitudinales semblent indiquer que la perte de masse musculaire et l’augmentation de l’adiposité intramusculaire et viscérale apparaissent de façon concomitante au cours de l’avancée en âge. De fait, un cycle s’installe : la perte musculaire associée à la réduction de la mobilité favorise la diminution de la dépense énergétique et donc l’adiposité. L’accumulation de graisses notamment intramusculaire favorise alors l’apparition d’une insulinorésistance et d’une inflammation qui peuvent à leur tour amplifier le phénomène de perte musculaire en ralentissant le renouvellement des protéines musculaires. Les conséquences de cette infiltration lipidique des muscles sont multiples : réduction de la force et de la performance musculaire, limitation de la mobilité, fragilité, diminution de la qualité de vie, etc. Plus généralement, l’obésité sarcopénique comporte des risques spécifiques qui peuvent être d’ordre cardiovasculaire, métabolique mais aussi respiratoire.
Quelle stratégie appliquer ?
L’action thérapeutique doit être préventive vis-à-vis de l’obésité sarcopénique. Il s’agit de lutter contre la réduction de la mobilité, diminuer les apports lipidiques tout en maintenant naturellement un apport énergétique suffisant, favoriser l’apport protéique, optimiser l’oxydation des acides gras par les muscles et réduire l’adiposité centrale et ectopique par la promotion de l’activité physique. Des travaux ont montré qu’un entrainement physique (90 minutes de cardio respiratoire, renforcement, équilibre et souplesse) associé à une restriction calorique limitée (500 à 750 kcal de déficit et 1 g de protéine/kg de poids/jour) pouvait réduire le poids tout en maintenant une bonne performance physique, voire en l’améliorant.
Le défi des prochaines décennies sera de considérer ce nouveau phénotype corporel d’obésité dans l’analyse des trajectoires de santé des individus.
Source : L’Obésité sarcopénique : causes et conséquences. Boirie Y, Farigon N, Miolanne M, Montel F, Lahaye C, Guillet C, Walrand S. 2016 sous presse. http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0007996015001820