Insuffisance rénale : le rôle essentiel de l'alimentation – Témoignages
En France en 2014, près de 11 000 nouveaux patients étaient traités pour une insuffisance rénale terminale, représentant ainsi un total de près de 80 000 patients en IRTT.
A côtés des médicaments et des longues heures en séance de dialyse (pour les patients non greffés), les recommandations alimentaires tiennent une place essentielle dans la prise en charge de la maladie.
Pourtant, les patients dialysés souffrent aujourd’hui d’un manque d’informations et d’accompagnement dans le domaine de l’alimentation et de la diététique.
NUTRISENS est allé à la rencontre de Bernard et Fanta, deux patients dialysés et greffés depuis plusieurs années. Au travers de ces témoignages patients, ils partagent leur expérience de la dialyse et échangent sur les difficultés qu’ils ont pu rencontrer.
Dialyse et alimentation : avez-vous la sensation d’être bien informé ?
Bernard : Lorsque j’étais encore dialysé, je n’avais aucune information sur des recommandations alimentaires. J’ai dû me débrouiller seul. J’ai toujours beaucoup apprécié la gastronomie et les repas en famille, mais désormais je prends mon repas un peu plus en retrait et je suis revenu à des petites portions. Je m’oblige également à manger de la viande pour mes apports en protéines, mais j’avoue que je m’en passerais si je le pouvais.
Fanta : J’ai également le sentiment de ne pas avoir été assez informée sur ce sujet.
Par ailleurs, pendant ma première année de dialyse, j’ai progressivement perdu l’appétit. J’étais effrayée de perdre autant de poids. J’ai également failli mourir à cause d’une intolérance en fer due à la prise de certains médicaments.
Bernard : Les médicaments en fer sont en effet très complexes. Pour ma part, je me suis retrouvé avec 50% d’hémoglobine il y a 3 semaines, sans que les médecins ne sachent pourquoi !
On peut être anémié ou avoir des troubles de l’anémie, les soignants ne savent pas nous expliquer la provenance de ce problème, ni nous apporter de réelles solutions.
Dialyse et suivi diététique : qu’en pensez-vous ?
Fanta : J’ai bénéficié d’un suivi lorsque j’ai été hospitalisée, mais plus par la suite. Je n’ai jamais rencontré de diététiciens pendant ma dialyse en centre. J’ai participé à des ateliers sur l’alimentation avec RENIF (Réseau ville-hôpital du réseau de néphrologie d’Île-de France), mais c’était dans le cadre de mon travail de bénévole à la FNAIR Ile de France. J’ai également participé à un atelier sur la Nutrition à l’hôpital, mais c’était la seule fois en 11 ans d’hospitalisation !
On nous dit surtout ce qu’on doit éviter de manger, on nous parle de tous les aliments qui sont interdits. On est un peu perdu… On devrait plutôt nous dire ce que l’on peut manger, en fonction de nos goûts.
Bernard : Je trouve qu’on n’appuie pas assez sur le rôle de l’éducation thérapeutique en France.
Nous rencontrons de nombreux effets indésirables avec la prise des médicaments, qui pourraient être compensés par l’alimentation. Depuis que je suis malade, mon épouse s’est beaucoup intéressée à la médecine chinoise. Elle a ainsi adapté les repas à la maison et ça fonctionne bien pour moi, j’ai un meilleur transit notamment. Je trouve qu’il y a un réel besoin d’éducation, tant pour le patient que pour son entourage.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez au quotidien ?
Fanta : Lorsque j’étais encore dialysée, je n’avais quasiment plus de vie car je faisais très régulièrement des chutes de tension, je tombais dans la rue. Je n’osais plus sortir car je n’avais plus confiance dans mon corps. Et lorsque tu sors c’est très compliqué car il y a plein de choses que tu ne peux pas manger. Alors tu choisis ce que tu peux grignoter mais parfois ça peut être gênant de devoir expliquer pourquoi, aux personnes qui partagent le repas avec toi.
Bernard : Pour ma part, j’étais un grand amateur de vin mais j’ai dû complétement arrêter d’en consommer. Les médicaments ont parfois des effets secondaires sur le foie et c’est déjà suffisant. D’un autre côté, avec la dialyse péritonéale je n’avais pas de chutes de tension, j’ai pu conserver plus d’autonomie.
Quelles sont vos attentes ?
Fanta : Pour moi, la Nutrition est un véritable combat. Je suis d’ailleurs en train de me former pour devenir conseillère en économie familiale pour pouvoir aider d’autres personnes à prévenir et gérer les problèmes de leur vie quotidienne.
Bernard : L’alimentation est un sujet passionnant. Je trouve que la vraie difficulté vient d’un manque d’accompagnement de la part des soignants. Il y a là un vrai besoin d’informations et d’éducation à mon sens. D’autre part, je trouve également qu’il y a de vrais efforts à mener dans le domaine de la diététique pour le bon usage des médicaments. Nous prenons énormément de médicament tout au long de notre maladie, c’est-à-dire tout au long de notre vie, et les effets indésirables rencontrés impactent énormément notre vie. Les aliments et les médicaments peuvent abîmer notre corps. Il faut donc véritablement intégrer les prescriptions alimentaires dans le suivi des patients. Nous avons absolument besoin de retrouver du plaisir en mangeant !
« On nous dit surtout ce qu’on doit éviter de manger, on est un peu perdu. […] Nous avons absolument besoin de retrouver du plaisir en mangeant ! »